Eugène Scribe à Seine-Port

SEINE-PORT ET LE CHÂTEAU DE SERICOURT

Gens de théâtre à la campagne

par Jean-Claude YON

 

La Seine-et-Marne doit à sa proximité avec Paris la particularité d’avoir été, au XIXe siècle, un lieu de villégiature fort recherché par le monde du théâtre. Paris est alors la capitale mondiale du théâtre, une « usine à plaisir » dont le fameux boulevard du Crime est demeuré dans la mémoire collective la  pittoresque vitrine. Sur les cinq continents, tous les pays puisent dans l’immense répertoire parisien.

Cette domination entraîne une autre forme de rayonnement géographique : de même que Hollywood ne peut se concevoir de nos jours sans Beverley Hills, les gens de théâtre du XIXe siècle n’ont de cesse de fuir la capitale pour se retrouver dans ce que l’on commence à appeler la banlieue, là où chacun – auteur, artiste ou directeur – se doit d’avoir une propriété et de recevoir dignement ses amis. Qui plus est, une maison de campagne à proximité de Paris est le lieu idéal pour écrire tranquillement une pièce, apprendre un rôle ou terminer une partition. La Seine-et-Marne voit ainsi, les beaux jours venus, nombre de célébrités dramatiques arriver en diligence, en bateau à vapeur ou en cabriolet, puis, à partir des années 1850, en chemin de fer. Le développement du réseau ferroviaire a beau inciter certains à suivre la vogue du tourisme naissant qui les entraîne vers les plages de la Manche, de l’Atlantique et de la Méditerranée, les environs de Paris continuent encore longtemps d’attirer ceux qui ont bâti leur fortune et leur succès aux lueurs de la rampe.

Si la liste est longue des hommes et femmes de théâtre qui ont choisi la Seine-et-Marne au XIXe siècle, deux d’entre eux ont ressenti pour leur région de villégiature une véritable passion. Le premier, Ernest Legouvé, est tombé dans l’oubli ; le second, Eugène Scribe, n’est plus célèbre que par son nom, alors que son répertoire (425 pièces !) a fait de lui l’auteur français le plus joué de son temps. Bien plus connu de nos jours est assurément Eugène Labiche, qui se rattache, lui aussi, à la Seine-et-Marne ; mais Labiche n’a avec le département qu’un lien matrimonial : le minotier de Gonesse dont il épouse la fille en 1842 possède en effet le beau château Louis XIII de La Grange-le-Roy, près de Coubert. Labiche y vient souvent chercher le calme pour écrire ses vaudevilles ; mais c’est en Sologne qu’il achète, en 1853, le château d’Aulnoy, situé sur la commune de Souvigny. Labiche se plaît tant à Souvigny qu’il en devient maire en 1868 ; la Seine-et-Marne n’aura donc été pour lui qu’une étape, même s’il lui arrive, depuis Paris ou depuis La Grange-le-Roy, de venir rendre visite à Legouvé ou à Scribe.

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Extrait de La Seine-et-Marne des écrivains, (c) Alexandrines 2015.

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