Albert Samain à Lille

LILLE

Entre Lille et Paris : Albert Samain, poète de la tristesse,
par Alain NICOLAS
(extrait)

Albert Samain vécut à Lille de 1854 (année de sa naissance, au 75, rue de Paris) à 1880. Son père y tenait un modeste commerce de vins. Selon le poète Achille Ségard, le jeune Albert, élève au Lycée de Lille, « était un enfant […] un peu timide et silencieux, désireux d’apprendre, d’imagination ardente, instinctivement opposé à tout exercice physique ». La mort de son père en 1868 l’obligea à abandonner ses études ; il fut d’abord saute-ruisseau dans une banque, puis employé chez un courtier en sucre, il entra enfin dans la banque Debayser. Ces petits métiers ne l’empêchèrent pas de se perfectionner seul dans la connaissance du grec, de l’anglais, et de commencer à écrire des vers.

À partir de 1880, Samain habita Paris, où il rejoignit d’abord la maison Debayser puis devint expéditionnaire au bureau de l’Enseignement à l’Hôtel de Ville. Il logeait avec son frère et avec sa mère, jusqu’à la mort de celle-ci en 1899, mort qui lui causa un immense chagrin. Toujours préoccupé de sa santé, affecté d’une certaine peur devant l’existence, il réussit néanmoins à concilier sa vie professionnelle et la fréquentation des milieux artistiques et mondains : il entretenait des relations aussi bien avec des musiciens et des poètes (dont certains comme le Belge Georges Rodenbach et le Boulonnais Jehan-Rictus lui rappelaient son Nord natal) qu’avec les habitués des salons immortalisés par Marcel Proust (la princesse de Polignac, Robert de Montesquiou). Mais on ne lui connaissait aucune relation amoureuse et il restait un personnage mystérieux, même pour ses proches.

Deux recueils de poèmes d’un symbolisme discret et précieux, triste et langoureux, mélodique et décadent, parurent de son vivant : Au jardin de l’Infante (1893) et Aux flancs du vase (1898).

Le nord de la France n’apparaît dans les vers de Samain que par le poème « Mon enfance captive… », que beaucoup d’écoliers apprirent autrefois par cœur et qui dresse une chronologie de ses rapports avec sa région natale : d’abord, rejet de la laideur industrielle compensé par un rêve oriental d’évasion, puis retour intérieur au pays des origines, à son « peuple grave et droit », à ses paysages naturels et à sa tristesse, symbolisée par le dernier vers : « Et cette veuve en noir avec ses orphelins… », qui rappelle la mère du poète, tant aimée par celui-ci.

[…]

 

Extrait de l’ouvrage :Balade dans le Nord, sur les pas des écrivains (c) Alexandrines, février 2005

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