Maurice Blanchard à Montdidier

LE SANTERRE ET LA HAUTE-SOMME

Maurice Blanchard l’enfant sauvage de Montdidier
Par Jean-Hugues MALINEAU
(extrait)

Pour Maurice Blanchard plus que pour tout autre écrivain ou poète, « la poésie et la vie sont intimement mêlées » dans la mesure où le poème est toujours écho métaphorique de la vie réelle, « souvenir du souvenir ».

Pour ce fils du pays né le 14 avril 1890, l’enfance solitaire et malheureuse nourrira les révoltes et les batailles intérieures à venir, elle nourrira de rancune sans pardon et de colère la future parole poétique.

Fils unique d’un père et d’une mère appartenant à de vieilles familles du faubourg Saint Martin, il naquit au pied de la colline de l’abbaye (prieuré des moines bénédictins), appelé « l’Abie » par les anciens Montdidériens.

Son père qui deviendra par la suite maire de Montdidier de 1923 à 1925,quitte sa mère dès la naissance de l’enfant. Celle-ci qui mène une vie plus que modeste « gardera » Maurice plus qu’elle ne s’occupera de lui, et Blanchard confiera qu’il ne se souvient pas d’une marque de tendresse de sa part son enfance durant ! Plus encore, sa mère, dans la misère elle même, va refuser à son fils le droit le plus élémentaire à l’instruction.

Maurice qui est un élève sensible et très intelligent sera, malgré l’insistance de son maître d’école, engagé, à l’âge de douze ans apprenti serrurier chez le maréchal ferrant du faubourg.

Un peu plus tard, écrira Blanchard dans un poème autobiographique, « une grande joie, la loi de dix heures avec une ombre : nettoyer l’atelier le dimanche, ranger les outils et la ferraille. La loi n’en parlait pas, ni pour ni contre, donc… »

Cette solitude sans amour et cette misère vont faire de l’enfant craintif et timide un enfant « sauvage » et du futur poète une véritable « bête sauvage » qui s’identifiera lui-même au tigre, au jaguar ou au sanglier.

Pêcheur de brochets, tueur de lapins durant ses rares moments de répit, l’enfant amoureux de la rivière, des arbres et de la lumière, vit surtout dans une atroce souffrance solitaire : « Ce fut un enfant abandonné sur un fagot d’épines. Ce fut un adolescent sans espoir et sans lumière. Ce fut une taupe dans son royaume souterrain et la terre lui fut un refuge contre la bassesse du ciel. »

L’enfant joue même un jour à creuser sa tombe dans les feuilles mortes d’automne ; un autre jour, raconte-t-il, « à cinq ans, j’ai mangé le nez d’un innocent entêté. Comme le nez a saigné ! »

A huit ans, premier poème avec des mots qu’il invente, en dévalant la colline à toute vitesse par un soir de grand vent :Estave ô minaure / Sirtace dismen / Olh janosb héricante / Bahia la carsillo/ Mintem…

[…]

Extrait de l’ouvrage : Balade dans la Somme, sur les pas des écrivains (c) Alexandrines, mars 2007

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