Jean Lorrain : « Nice l’été, la dernière tombe où l’on cause »
par Éric Walbecq
« Et oui, chère amie, je me prépare lentement à vous revenir à Paris mais le printemps de la Riviera me captive et me retient dans le charme caressant de sa douceur et de ses parfums. Nice, vide de filles et de rastaquouères est redevenue une indolente petite ville italienne et, comme Renaud prisonnier d’Armide, je suis captif des oliviers de mon jardin.
« Tout près, c’est le port, ses matures et le bleu de la méditerranée. C’est une griserie sensuelle et très grave dont je savoure lentement l’ivresse car, la retrouverai-je l’an prochain ? C’est peut-être sa nouveauté même qui me séduit et puis cette joie de ne pas voir de Parisiens. »
Daté du 29 avril 1902, cet extrait d’une lettre inédite de Jean Lorrain à la chiromancienne Madame de Thèbes résume les rapports de l’écrivain avec Nice. « Luxe, calme et volupté » pourrait-on dire ! À l’extrême fin du xixe siècle, Lorrain a beaucoup voyagé : l’Italie, l’Afrique du Nord et la Riviera qui l’enchante. Lassé de vingt-cinq années de journalisme parisien, de fêtes perpétuelles, de mondanités, de premières au théâtre, Lorrain s’installe en 1900 à Nice, Villa Bounin, boulevard de l’Impératrice de Russie. La villa est spacieuse, avec un immense verger, et une vue imprenable sur l’océan. Avec sa mère il va vivre à Nice les dernières années de sa vie. Ce ne seront pas forcément ses années les plus calmes, mais au moins il échappe à Paris et aux Parisiens….
Extrait de l’ouvrage : Balade à Nice, sur les pas des écrivains (c) Alexandrines, avril 2012